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De côté, pas encore lu
« C'est parti pour le colloque "anarchisme et sciences sociales" ! Petit livetweet ici :) http://ceraps.univ-lille2.fr/fr/actualites/detail-article/archive/2018/march/article/colloque-anarchisme-et-sciences-sociales.html?tx_ttnews%5BbackPid%5D=16&cHash=d70480d3df
Introduction : On est à l'université de Lille Droit et Santé, au laboratoire Ceraps, dont on remercie le soutien et le travail des administratifs. Petit rappel du contexte pour commencer : on est en pleine mobilisation contre les réformes néolibérales de l'université avec un amphi occupé à l'université de Lille 3, au lendemain d'une grande manifestation. L'université, et en particulier les sciences sociales, comme mode de formation critique, sont dans le collimateur du gouvernement. Hasard du calendrier : c'est aussi le procès de Tarnac
L'Etat est en lutte contre les sciences sociales et contre les anarchistes, ce qui fait écho aux 50 ans de mai 68, qui révèle, en France et ailleurs, le danger et la subversion de l'université comme lieu de discussion et de transmission libre des savoirs critiques.
Ce colloque essaie de penser les liens entre anarchisme et sciences sociales, dans un contexte de renouveau d'intérêt intellectuel pour l'anarchisme, avec la naissance des Anarchist Studies etc. (voir notre appel à communications ici : http://calenda.org/418576 )
Session 1. Théorie politique et anarchisme. On commence avec Marion Tillous (géographie, Legs, Paris 8), "Perspectives anarcha-féministes en géographie : l'Etat, la famille, et la chercheuse". Elle travaille sur les controverses autour de la non-mixité dans les transports publics
L'anarcha-féminisme, sur ces questions, interdit de s'en remettre à l'Etat, comme outil de protection ou même enjeu de lutte féministe (les femmes pourraient devenir dominantes dans l'Etat), car l'Etat n'est pas neutre, il est intrinsèquement patriarcal (cf Carole Pateman)
On enchaîne avec Francis Dupuis-Déri (science politique, Iref, Université du Québec à Montréal), "Le Principe désespérance. Propositions pour une philosophie anarchiste de l’Histoire". Il montre que plusieurs philosophies de l'histoire coexistent chez les auteurs anarchistes. La plus pertinente selon lui, celle selon laquelle l'humain est traversé par une antinomie fondamentale entre deux forces antagonistes, la domination et l'autonomie. Cette antinomie (sans résolution dialectique) traverse tous individus et est irréductible à la lutte des classes.
On passe à la discussion, il y a du monde et plein de questions
Après une pause, on reprend. L'occasion de faire un peu de publicité pour La Brique, journal de critique sociale http://labrique.net
Manuel Cervera-Marzal (science politique, Casa de Velazquez, Madrid), "La philosophie politique française refoule-t-elle son héritage anarchiste?" Discussion de Rancière, Abensour, Lefort et Castoriadis, qui ont en commun de s'opposer à l’idée que la politique, c’est l’ordre. Le paradoxe, c'est que ces auteurs, qui ont une conception de la politique comme désordre (démocratie sauvage, insurgente, etc.), prennent leur distance avec l'anarchisme. Abensour, Rancière, par exemple, défendent l'anarchie contre l'anarchisme. Tous ces auteurs pointent l'incapacité des anarchistes à penser la politique, le pouvoir, voire le social. Si l'anarchisme veut l'ordre moins le pouvoir, ces auteurs défendent la démocratie comme le pouvoir (capacité collective) sans l'ordre (commandement et ordonnancement).
On passe à Ali Kébir (philosophie,Caphi, Rennes 1) : "Ce que l'anarchie fait à la philosophie politique". Avec une impossibilité à penser ce que serait une philosophie politique anarchiste, car l'exigence anarchiste est contredite par le geste même de la philosophie politique. En effet, la philosophie politique entend déterminer l’arkhé, le fondement de la vie en communauté., ce que la politique doit être en vérité. C'est ce que dit Rancière : le philosophe ordonnance la polis (c'est la police), la philosophie est intrinsèquement disciplinaire.
Contre ça, il faut penser avec Absensour ("Démocratie sauvage et principe d’anarchie") faire une philosophie politique critique à partir de la déconstruction des fondements de l'arkhé. Mais plutôt que se fonder sur la théorie critique, Kébir propose de s'appuyer sur la généalogie. La généalogie de Foucault ne repose pas sur des fondements normatifs, elle vise à rapporter les arkhai du présent, qui se donnent comme naturels et nécessaires, à leur forme historique d’émergence. Problème : ça peut nous laisser démuni-e-s pour l'action.
Kébir (après Abensour) en appelle alors à l'utopie, qui ne fonctionne pas par prescription, mais par inspiration. L’inspiration utopique ne légifère pas, mais imagine, et montre un monde meilleur, exhibe une virtualité pratique qui avive un désir d’émancipation préexistant.
Dernière intervention de la matinée : Vincent Millou (théorie politique, Cevipof, IEP de Paris), "La question de la non-violence. Des théories de la désobéissance civile aux luttes contemporaines". A partir de Seattle 1999, renouveau d'intérêt pour désobéissance civile. Problème : souvent, les auteurs englobent beaucoup de choses différentes sous le terme désobéissance civile, sans prendre en compte la manière dont les acteurs pensent cette catégorie, et leurs divisions par exemple autour de la distinction violence / non-violence.
La discussion a été vive. On a parlé de non-violence, de Walter Benjamin, du rapport des démocrates radicaux au marxisme, de la pluralité des anarchismes, de l'ana-archie, du pouvoir de / pouvoir sur. Maintenant on va manger. Suspension du livetweet »
https://twitter.com/SamuelHayat/status/977179926184038400
« Reprise du LT commencé dans le tweet cité. Cet après-midi, deux sessions en parallèle, une sur les épistémologies de l’anarchisme, l'autre sur "Anarchisme et approches empiriques du social". Je commence par celle-ci.
On commence par Annalisa Lendaro (sociologie, Certop, Toulouse 2), "Désobéissance et rapports à la légalité dans la vallée de la Roya : réflexions sur/pour une sociologie politique anarchiste", sur l'infra-politique (James Scott) de la désobéissance. Il s'agit d'une enquête sur les gens qui désobéissent pour aider les migrant-e-s dans la vallée de la Roya, à la frontière franco-italienne, qui repose sur un "faire-ensemble" entre enquêtrice et enquêté-e-s - une méthode pour une socio-anthropologie anarchiste
On passe à Costantino Paonessa (histoire, LarHis, Université catholique de Louvain la Neuve), "Classe, race et anarchistes italiens dans l’Egypte du début XX siècle : une analyse intersectionnelle de leur activisme". La question de départ est simple : Pourquoi anarchisme ne s’est pas implantée en Egypte, au tournant du XIXe-XXe, alors que ça a pris ailleurs ? Pour le comprendre, il faut saisir le militantisme des anarchistes en Egypte au prisme de la race. Paonessa décrit les mécanismes racisants des anarchistes vis-à-vis des travailleurs locaux. Ca passe par des représentations négatives infériorisantes des indigènes par les anarchistes, et par des processus de différenciation ou de concurrence concrets à base raciale.
Intervention suivante : Manon Him-Aquilli (sociolinguistique, Cerlis, Paris Descartes), "Que pourrait bien être une sociolinguistique anarchiste ?" Elle s'intéresse à la contradiction entre horizontalité et rapports de pouvoir dans discussions en assemblée générale. Elle fait un retour sur expérience : la difficulté à travailler sur les militant-e-s, du fait de leur stratégie discursive anti-intellectualiste, selon laquelle seul-e-s les militant-e-s peuvent comprendre l'expérience du militantisme et donc en parler. A l'inverse, une sociologue travaillant sur les militant-e-s étaient vue comme une dominante, commettant une faute morale de "faire carrière" sur le dos des militant-e-s. Pourtant, beaucoup de ces militant-e-s autonomes étaient étudiant-e-s ou doctorant-e-s, souvent d'IEP ou ENS. Mais ils travaillaient plutôt sur l'ennemi (patriarcat, prison...) Leur anti-intellectualisme n’était pas lié à l’idée que seuls les acteurs peuvent parler de leur expérience, mais plutôt à des relations de savoir-pouvoir : le milieu militant n'est pas hors pouvoir.
L'engagement ethnographique amène M Him-Aquilli à "virer indigène", passage entier au milieu militant. Elle observe donc en elle des formes de socialisation contradictoires, un processus qu'elle vit d'abord sous l'angle du langage.
La discussion est engagée par Anne Clerval sur les rapports entre ces actions militantes et le mouvement anarchiste ; sur la nécessité ou pas de s'engager pour rendre une recherche légitime ; sur l'intérêt de ces approches pour analyser les pratiques des anarchistes.
Pendant ce temps, l'autre atelier parlait épistémologies de l'anarchisme, avec une intervention d'Erwan Sommerer (science politique, GES/CRHI, Nice), "Dispersion de la vérité, constructivisme et scepticisme moral : la sociologie de la connaissance mène-t-elle à l’anarchisme ?". Il interroge la relation entre anarchisme et sociologie de la connaissance, à partir des travaux de K Mannheim, mais aussi de Schütz, Berger et Luckmann. Leur constructivisme montre comment les crises mettent au jour la malléabilité du monde social. Selon lui, l’anarchisme pourrait trouver dans le constructivisme matière à justifier sa réticence envers les systèmes socio-politiques figés et l’essentialisme identitaire.
Autre intervention, Pierre-André Jarrillot (anthropologie, Paris 8) « L’Éversion, un paradigme pour une science anarchiste ». Il oppose le paradigme de l’évolutionnisme au paradigme éversionniste, qui est une dialectique révolutionniste.
Le 3è, Guillaume de Gracia (anthropologie, Toulouse), n'a pas pu venir parler de "La gonzo anthropologie ou comment tenter de produire une science sociale anarchiste tout en s’extrayant de l’Etat comme objet d’étude pour mieux participer à sa destruction" Mais ça avait l'air bien
Audric Vitiello a ensuite animé la discussion mais je n'ai pas pu y assister, heureusement tout est filmé, vous aurez donc peut-être un jour accès à mieux qu'un live-tweet :) »
https://twitter.com/SamuelHayat/status/977477743016316933
« Reprise du colloque "anarchisme et sciences sociales", mais on a déserté la salle prévue pour rejoindre l'amphi occupé E.3.04 à l'Université de Lille droit et santé, à l'invitation des étudiant-e-s et personnels occupants, que l'on remercie de leur accueil
On commence avec Vivien Garcia (philosophie, Laboratoire Philosophie, Pratiques & Langages, Grenoble) sur "Le postanarchisme aujourd’hui". La question est de rendre compte d'une importation des idées postmodernes par les anarchistes. La rencontre se fait d'abord aux Etats Unis. L'anarchisme apparaît plus adapté que le marxisme pour rendre compte des mouvements post 68, mais l'anarchisme dit classique ne convient pas car il tombe dans le piège de la modernité, étant seulement une radicalisation du libéralisme. D'un point de vue pratique, multiples développements postanarchistes, qui donnent lieu à des discussions, notamment entre insurrectionnalistes. Depuis 2010, nouveaux développements, autour d'Anarchisr Developments in Cultural Studies notamment. Idée qu'en fait anarchisme et post anarchisme ne sont pas si différents. Colloque the anarchist turn à la New school à New York, pour tournant anarchiste en philo et en sciences sociales. Aujourd'hui le postanarchisme s'intéresse plutôt au réalisme spéculatif. Conclusion : pas sûr que le postanarchisme serve à quelque chose scientifiquement et politiquement.
On passe à Irène Pereira (philosophie, Iresmo, ESPE Créteil), "Sciences sociales et anarchisme : à l’épreuve des pratiques anti-oppression". Lien entre théorie et mouvements sociaux, comment les sciences sociales sont bousculées par des mouvements. Comment les sciences sociales viennent bousculer l'anarchisme ? En particulier l'anti-oppression, courant apparaissant dans années 90 : ensemble de pratiques s'appuyant sur sciences sociales et idées militantes pour rendre le mouvement social plus inclusif. L'arrivée de ces réflexions chez les anarchiste passe d'abord par le féminisme radical, par la mouvance queer radicale, par le mouvement anarchiste people of color et le mouvement décolonial. Articuler anticapitalisme et luttes anti oppression. L'anarchisme pensait souvent qu'il suffisait de rendre l'organisation horizontale pour éliminer les problèmes de pouvoir. Mais des travaux notamment féministes montrent que ça n'est pas vrai, et l'horizontalité est récupérée par le néolibéralisme. D'où intérêt pour antioppression. Ces pratiques sont importées par des militant-e-s qui ont découvert féminisme radical, black feminism, intersectionnalité, notion de privilège social, théorie queer et sociologie du genre, pensée décoloniale (issue de monde latino américain, groupe colonialite et modernité). Malentendus entre ces théories universitaires et les mouvements sociaux, notamment anarchiste. Cf les anti racialistes. Malentendus sur constructivisme social et postmodernisme. Enfin controverses entre anarchistes sur les rapports entre athéisme et islamophobie
Ces pratiques anti oppression remettent en cause les relations de pouvoir interpersonnelles, et viennent objectiver la position sociale des militants (beaucoup d'hommes blancs classe moyenne), difficulté quand on est un mouvement de défense des dominés
Discussion sur la pensée décoloniale, le réalisme spéculatif, les lignes de privilège, le féminisme matérialiste québécois, ce colloque à la New school of social research. On décide de rester pour la 2e session. Les occupant-e-s commencent peut-être à regretter leur invitation 😂
On reprend avec Caroline Fayolle (histoire, Lirdef, Montpellier), "Une lecture anarchiste de la Révolution française. L’apport historiographique de Daniel Guérin". L'urgence politique du présent est au fondement de la lecture de l'histoire de Guérin, figure marxiste-libertaire
Petit point sur la biographie militante de ouf de Guérin. Révolution française au centre de sa réflexion. Publie beaucoup sur le sujet, notamment son chef d'oeuvre Bourgeois et bras nus, récemment réédité par @LibertaliaLivre avec présentation de Claude Guillon @LignesDeForce
Pour Guérin, la Révolution n'est pas un bloc, et il y a un germe socialiste libertaire dans la Révolution. Il propose une lecture de l'histoire s'inscrivant dans la théorie anar (Proudhon, Kropotkine) plutôt que l'école dominante de l'époque, l'école jacobine (Lefebvre, Soboul). Il essaie de dédoubler la Révolution, il y montre une conflictualité structurelle, de classe, avec la bourgeoisie qui s'empare de l'appareil d'Etat, et le proto-prolétariat dans le sans-culottisme (idée très critiquée par Soboul, comme sa vision de Robespierre). Cette opposition de classe est aussi une opposition entre deux conceptions de la démocratie: gouvernement représentatif contre démocratie directe (portée notamment par Commune de Paris). Pour lui, affrontement de 2 avant-gardes (Terreur contre embryon de dictature du prolétariat).
Projet de "déjacobinisation de la Révolution", passe par lecture de Proudhon (Idée générale de la Révolution), pour qui la Révolution aurait dû amener à une République du travail, mais a failli du fait du "préjugé gouvernemental" et méfiance du prolétariat des révolutionnaires
Il lit aussi Kropotkine (La Grande Révolution), qui reprend critique du "préjugé gouvernemental", cette fois-ci des historiens, qui dénaturent la Révolution en mettant au centre parlementaires. Pour lui deux courants dans la Révolution, celui des jacobins et celui des anarchistes
Spécificité de Guérin: se nourrit de penseurs ayant un rapport politique et non savant au passé. Et lui aussi pense avec le présent, veut réactiver un passé vivant (cf travaux sur référence au passé, contre l'usage au passé : le passé toujours inachevé cf Benjamin ou Castoriadis)
On passe à Philippe Corcuff (science politique, Cerlis, IEP de Lyon), "Mettre en tension Gabriel Tarde et Pierre Bourdieu : ressources sociologiques pour une actualisation de la pensée libertaire". Il va faire un papier sur dialogue entre théorie sociologique et philosophie.
Mise en tension de deux auteurs, Gabriel Tarde et Pierre Bourdieu, dans la perspective des antinomies proudhoniennes. Bourdieu ne fait pas référence à Tarde, et les deux ne sont pas anarchistes, même si Bourdieu, dans ses engagements, à pu avoir des éléments libertaires
Dans anarchisme, mise en tension individualités / cadres sociaux. On peut trouver des ressources chez Tarde, rôle de l'imitation, lecture interactionniste des relations sociales. Chez Bourdieu, les habitus et les champs s'inscrivent dans relations, mais structurales.
Comment penser l'émancipation autonome quand on critique le règne de l'opinion (comme Bourdieu le fait, comme Platon, ce qui amène Rancière à les renvoyer deux à deux) ? Il y a des ressources chez Tarde, concept de conversation : la presse anime le programme des conversations.
On passe à la discussion. sur la conception marxiste de l'histoire, les hérésies médiévales, la transduction d'Henri Lefebvre, les Enragés, de la dialectique, de la neutralité axiologique, de Proudhon, des jeux de langage, du programme de Gotha. Allez, pause déj, à plus
On reprend en ateliers séparés, pendant que l'AG se prépare en amphi E.3.04. Une session "Des sciences sociales anarchistes" animée par Isabelle Bruno (Ceraps, Lille), l'autre sur "L’anarchisme, une pensée du social, animée par Edouard Leport (Cresppa-CSU, Paris 8).
On commence la 1ère session avec un intervention de Jean-Charles Buttier @jcbuttier (science de l’éducation, Édhice, Genève), "Pour une histoire politique de l’éducation : l’apport de la pédagogie libertaire à la mise en place de l’école républicaine (1878-1914)"
James Guillaume a enseigné, il s'engage dans la fédération jurasienne, il doit quitter la Suisse, appelé en France par Ferdinand Buisson pour participer au Le Dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire. C'est un anti-autoritaire chez les républicains, important pour sa participation au dictionnaire, bible des instituteurs, et à la Revue pédagogique. Son importance dans l'histoire pédagogique vient de ses Idées sur l'organisation sociale, où il repense le rôle de l'instituteur. Quelle importance pour la didactique ? Intérêt d'historiciser les supports, replacer la didactique dans le contexte des débats politiques et pédagogiques. Guillaume ayant eu un rôle de passeur, par delà frontière pédagogie/politique, il est intéressant pour cette historicisation
On passe à Charles MacDonald (ethnologie, ADES, Aix-Marseille), "Ethnologie et Anarchisme. Les systèmes anarchogrégaires". Il est venu à l'anachisme par l'anthropologie. Quel rapport entre anthropologie et anarchisme ?
Paradoxe : les ethnologues ont observé pendant un siècle et demi des populations anarchiques mais n'ont généralement pas utilisé les idées anarchistes. Pourquoi ? Ethnocentrisme, hégémonie du marxisme, difficulté à penser une société sans chefs (+ dur que sans propriété privée)
Il y a des exceptions : Clastres, Diamond, Morris. Mais généralement pas de réflexion sur les sociétés anarcho-grégaires, ou collectifs d'agrégation faible, définis par 3 traits : pas de chef, identités collectives non linéaires, force de cohésion.
Comment marchent ces collectifs ? Par la coopération volontaire entre individus autonomes, ce qui requiert le mutualisme, une synthèse plus importante que la réciprocité de Lévi-Stauss. Dans ces sociétés, règne des liens faibles, définis non par l'intensité des liens émotionnels, mais par sa faible durée et sa non validation par une autorité tierce. Ces liens étant temporaires, il faut les renforcer et les réparer (fission / fusion des bandes)
Quelles conditions de félicité de la vie collective de ces sociétés ? Dispositifs de signes et symboles mettant en scène la non hostilité. et surtout partage / réciprocité. Cf Mauss sur le don, obligation de donner, recevoir, rendre, moteur de l'organisation sociale.
Très important modèle, mais a rendu invisible celui du partage, ethos fondamental des collectifs anarcho-grégaires. C'est encore le noyau de notre moralité. Bim.
On finit l'atelier avec Philippe Pelletier (géographie, EVS, Lyon 2), "Géographie anarchiste, non — Géographes anarchistes, oui — Du danger du scientisme en politique". Pelletier fait partie du réseau des géographes libertaires. Mais pas d'accord avec l'idée d'une géographie anar. La géographie, à la fois science sociale et science naturelle. Importance historique de l'apparition du darwinisme social, qui nous renseigne sur les risques du scientisme en géographie (cf F Raztel, fondateur de géographie humaine, théoricien du Lebensraum, espace vital). Mais on sait moins qu'un autre aspect de géo a été instrumentalisé par développement urbain : le modèle du nazi Christaller des places centrales. Aux Etats Unis, on trouve des choses fortes chez E C Semple, vision déterministe de la géographie.
Ellworth Huntington fait le lien entre race et climat, théorie racialiste, président de la Société écologique américaine, de societe de géographes, d'eugenistes. N'oublions pas que premier modèles eugénistes sont aux Etats Unis (cf André Pichot sur l'eugénisme)
Les géographes anarchisteq fonctionnent en réseau, avec militants. cf Elisée Reclus, trois règles à la géographie sociale : lutte des classes, recherche de l'équilibre, décision souveraine de l'individu. Mésologie, science des milieux, l'homme est un milieu pour l'homme.
XiXe siècle, batailles académiques après Darwin pour recombinaison des disciplines. Parmi propositions, mésologie (Bertillon) et écologie (Haeckel), interactions des organismes entre eux et avec l'extérieur, angle très biologique (éco systèmes). Cette dernière a du succès.
Haeckel est un anti-socialiste, anti-égalitaire, darwinisme social radical, pas de libre arbitre, membre de Société pour l'Hygiene de la Race, de la Société de Thulé. Vacher le traduit et dans préface demande d'adopter comme devise "Déterminisme, inégalité, sélection"
Victoire de l'écologie, cf déclaration Barrows, la géographie est l'écologie humaine, géographie au service de l'aménagement du territoire. Cf sociologues de l'École de Chicago, spatialisation et modélisation de la ville. Occultation de tout ça dans les histoires de l'écologie
Après 1945, écologie académique gagne son rang d'idée dominante avec le catastrophisme de Vogt et Osborn. En France B de Jouvenel, ancien du PPF de Doriot puis fondateur de la néolibérale société du Mont-Pèlerin, fonde écologie politique, prologue de capitalisme vert planifié
Tournant du Rapport Meadows, à lire, prédictions fausses. Choc. Début du scientisme écologiste. Dangereux de mettre adjectif anarchiste à un science, même écologie ou géographie.
Pendant ce temps, session "L’anarchisme, une pensée du social", animée par Edouard Leport (sociologie, Cresppa-CSU, Paris 8). Avec Paula Cossart (sociologie, Ceries, Lille), "Se référer à l’histoire pour faire du municipalisme libertaire une ‘utopie réelle’ "
Clémence Nasr (théorie politique, Centre de théorie politique, Université libre de Bruxelles), "Du lieu à la pensée du corps social. Réinvestissement sociologique de la commune anarchiste"
Jean Bérard (histoire, ISP, ENS Saclay), « Peut-on briser le bâton de la justice ? L’anarchisme à l’épreuve de la justice pénale ». Je peux pas LT, j'ai hâte de regarder les vidéos et de lire les papiers. Bon bah du coup dernière discussion avant fin du colloque et AG de lutte
Fin du colloque "anarchisme et sciences sociales" et suspension de l'occupation de l'amphi (aucun lien hein). Merci à tou-te-s les participant-e-s, au personnel administratif, au public et aux éditions libertalia, aux Âmes d'Atala, au CCL pour la table de presse / infokiosk !
Introduction : On est à l'université de Lille Droit et Santé, au laboratoire Ceraps, dont on remercie le soutien et le travail des administratifs. Petit rappel du contexte pour commencer : on est en pleine mobilisation contre les réformes néolibérales de l'université avec un amphi occupé à l'université de Lille 3, au lendemain d'une grande manifestation. L'université, et en particulier les sciences sociales, comme mode de formation critique, sont dans le collimateur du gouvernement. Hasard du calendrier : c'est aussi le procès de Tarnac
L'Etat est en lutte contre les sciences sociales et contre les anarchistes, ce qui fait écho aux 50 ans de mai 68, qui révèle, en France et ailleurs, le danger et la subversion de l'université comme lieu de discussion et de transmission libre des savoirs critiques.
Ce colloque essaie de penser les liens entre anarchisme et sciences sociales, dans un contexte de renouveau d'intérêt intellectuel pour l'anarchisme, avec la naissance des Anarchist Studies etc. (voir notre appel à communications ici : http://calenda.org/418576 )
Session 1. Théorie politique et anarchisme. On commence avec Marion Tillous (géographie, Legs, Paris 8), "Perspectives anarcha-féministes en géographie : l'Etat, la famille, et la chercheuse". Elle travaille sur les controverses autour de la non-mixité dans les transports publics
L'anarcha-féminisme, sur ces questions, interdit de s'en remettre à l'Etat, comme outil de protection ou même enjeu de lutte féministe (les femmes pourraient devenir dominantes dans l'Etat), car l'Etat n'est pas neutre, il est intrinsèquement patriarcal (cf Carole Pateman)
On enchaîne avec Francis Dupuis-Déri (science politique, Iref, Université du Québec à Montréal), "Le Principe désespérance. Propositions pour une philosophie anarchiste de l’Histoire". Il montre que plusieurs philosophies de l'histoire coexistent chez les auteurs anarchistes. La plus pertinente selon lui, celle selon laquelle l'humain est traversé par une antinomie fondamentale entre deux forces antagonistes, la domination et l'autonomie. Cette antinomie (sans résolution dialectique) traverse tous individus et est irréductible à la lutte des classes.
On passe à la discussion, il y a du monde et plein de questions
Après une pause, on reprend. L'occasion de faire un peu de publicité pour La Brique, journal de critique sociale http://labrique.net
Manuel Cervera-Marzal (science politique, Casa de Velazquez, Madrid), "La philosophie politique française refoule-t-elle son héritage anarchiste?" Discussion de Rancière, Abensour, Lefort et Castoriadis, qui ont en commun de s'opposer à l’idée que la politique, c’est l’ordre. Le paradoxe, c'est que ces auteurs, qui ont une conception de la politique comme désordre (démocratie sauvage, insurgente, etc.), prennent leur distance avec l'anarchisme. Abensour, Rancière, par exemple, défendent l'anarchie contre l'anarchisme. Tous ces auteurs pointent l'incapacité des anarchistes à penser la politique, le pouvoir, voire le social. Si l'anarchisme veut l'ordre moins le pouvoir, ces auteurs défendent la démocratie comme le pouvoir (capacité collective) sans l'ordre (commandement et ordonnancement).
On passe à Ali Kébir (philosophie,Caphi, Rennes 1) : "Ce que l'anarchie fait à la philosophie politique". Avec une impossibilité à penser ce que serait une philosophie politique anarchiste, car l'exigence anarchiste est contredite par le geste même de la philosophie politique. En effet, la philosophie politique entend déterminer l’arkhé, le fondement de la vie en communauté., ce que la politique doit être en vérité. C'est ce que dit Rancière : le philosophe ordonnance la polis (c'est la police), la philosophie est intrinsèquement disciplinaire.
Contre ça, il faut penser avec Absensour ("Démocratie sauvage et principe d’anarchie") faire une philosophie politique critique à partir de la déconstruction des fondements de l'arkhé. Mais plutôt que se fonder sur la théorie critique, Kébir propose de s'appuyer sur la généalogie. La généalogie de Foucault ne repose pas sur des fondements normatifs, elle vise à rapporter les arkhai du présent, qui se donnent comme naturels et nécessaires, à leur forme historique d’émergence. Problème : ça peut nous laisser démuni-e-s pour l'action.
Kébir (après Abensour) en appelle alors à l'utopie, qui ne fonctionne pas par prescription, mais par inspiration. L’inspiration utopique ne légifère pas, mais imagine, et montre un monde meilleur, exhibe une virtualité pratique qui avive un désir d’émancipation préexistant.
Dernière intervention de la matinée : Vincent Millou (théorie politique, Cevipof, IEP de Paris), "La question de la non-violence. Des théories de la désobéissance civile aux luttes contemporaines". A partir de Seattle 1999, renouveau d'intérêt pour désobéissance civile. Problème : souvent, les auteurs englobent beaucoup de choses différentes sous le terme désobéissance civile, sans prendre en compte la manière dont les acteurs pensent cette catégorie, et leurs divisions par exemple autour de la distinction violence / non-violence.
La discussion a été vive. On a parlé de non-violence, de Walter Benjamin, du rapport des démocrates radicaux au marxisme, de la pluralité des anarchismes, de l'ana-archie, du pouvoir de / pouvoir sur. Maintenant on va manger. Suspension du livetweet »
https://twitter.com/SamuelHayat/status/977179926184038400
« Reprise du LT commencé dans le tweet cité. Cet après-midi, deux sessions en parallèle, une sur les épistémologies de l’anarchisme, l'autre sur "Anarchisme et approches empiriques du social". Je commence par celle-ci.
On commence par Annalisa Lendaro (sociologie, Certop, Toulouse 2), "Désobéissance et rapports à la légalité dans la vallée de la Roya : réflexions sur/pour une sociologie politique anarchiste", sur l'infra-politique (James Scott) de la désobéissance. Il s'agit d'une enquête sur les gens qui désobéissent pour aider les migrant-e-s dans la vallée de la Roya, à la frontière franco-italienne, qui repose sur un "faire-ensemble" entre enquêtrice et enquêté-e-s - une méthode pour une socio-anthropologie anarchiste
On passe à Costantino Paonessa (histoire, LarHis, Université catholique de Louvain la Neuve), "Classe, race et anarchistes italiens dans l’Egypte du début XX siècle : une analyse intersectionnelle de leur activisme". La question de départ est simple : Pourquoi anarchisme ne s’est pas implantée en Egypte, au tournant du XIXe-XXe, alors que ça a pris ailleurs ? Pour le comprendre, il faut saisir le militantisme des anarchistes en Egypte au prisme de la race. Paonessa décrit les mécanismes racisants des anarchistes vis-à-vis des travailleurs locaux. Ca passe par des représentations négatives infériorisantes des indigènes par les anarchistes, et par des processus de différenciation ou de concurrence concrets à base raciale.
Intervention suivante : Manon Him-Aquilli (sociolinguistique, Cerlis, Paris Descartes), "Que pourrait bien être une sociolinguistique anarchiste ?" Elle s'intéresse à la contradiction entre horizontalité et rapports de pouvoir dans discussions en assemblée générale. Elle fait un retour sur expérience : la difficulté à travailler sur les militant-e-s, du fait de leur stratégie discursive anti-intellectualiste, selon laquelle seul-e-s les militant-e-s peuvent comprendre l'expérience du militantisme et donc en parler. A l'inverse, une sociologue travaillant sur les militant-e-s étaient vue comme une dominante, commettant une faute morale de "faire carrière" sur le dos des militant-e-s. Pourtant, beaucoup de ces militant-e-s autonomes étaient étudiant-e-s ou doctorant-e-s, souvent d'IEP ou ENS. Mais ils travaillaient plutôt sur l'ennemi (patriarcat, prison...) Leur anti-intellectualisme n’était pas lié à l’idée que seuls les acteurs peuvent parler de leur expérience, mais plutôt à des relations de savoir-pouvoir : le milieu militant n'est pas hors pouvoir.
L'engagement ethnographique amène M Him-Aquilli à "virer indigène", passage entier au milieu militant. Elle observe donc en elle des formes de socialisation contradictoires, un processus qu'elle vit d'abord sous l'angle du langage.
La discussion est engagée par Anne Clerval sur les rapports entre ces actions militantes et le mouvement anarchiste ; sur la nécessité ou pas de s'engager pour rendre une recherche légitime ; sur l'intérêt de ces approches pour analyser les pratiques des anarchistes.
Pendant ce temps, l'autre atelier parlait épistémologies de l'anarchisme, avec une intervention d'Erwan Sommerer (science politique, GES/CRHI, Nice), "Dispersion de la vérité, constructivisme et scepticisme moral : la sociologie de la connaissance mène-t-elle à l’anarchisme ?". Il interroge la relation entre anarchisme et sociologie de la connaissance, à partir des travaux de K Mannheim, mais aussi de Schütz, Berger et Luckmann. Leur constructivisme montre comment les crises mettent au jour la malléabilité du monde social. Selon lui, l’anarchisme pourrait trouver dans le constructivisme matière à justifier sa réticence envers les systèmes socio-politiques figés et l’essentialisme identitaire.
Autre intervention, Pierre-André Jarrillot (anthropologie, Paris 8) « L’Éversion, un paradigme pour une science anarchiste ». Il oppose le paradigme de l’évolutionnisme au paradigme éversionniste, qui est une dialectique révolutionniste.
Le 3è, Guillaume de Gracia (anthropologie, Toulouse), n'a pas pu venir parler de "La gonzo anthropologie ou comment tenter de produire une science sociale anarchiste tout en s’extrayant de l’Etat comme objet d’étude pour mieux participer à sa destruction" Mais ça avait l'air bien
Audric Vitiello a ensuite animé la discussion mais je n'ai pas pu y assister, heureusement tout est filmé, vous aurez donc peut-être un jour accès à mieux qu'un live-tweet :) »
https://twitter.com/SamuelHayat/status/977477743016316933
« Reprise du colloque "anarchisme et sciences sociales", mais on a déserté la salle prévue pour rejoindre l'amphi occupé E.3.04 à l'Université de Lille droit et santé, à l'invitation des étudiant-e-s et personnels occupants, que l'on remercie de leur accueil
On commence avec Vivien Garcia (philosophie, Laboratoire Philosophie, Pratiques & Langages, Grenoble) sur "Le postanarchisme aujourd’hui". La question est de rendre compte d'une importation des idées postmodernes par les anarchistes. La rencontre se fait d'abord aux Etats Unis. L'anarchisme apparaît plus adapté que le marxisme pour rendre compte des mouvements post 68, mais l'anarchisme dit classique ne convient pas car il tombe dans le piège de la modernité, étant seulement une radicalisation du libéralisme. D'un point de vue pratique, multiples développements postanarchistes, qui donnent lieu à des discussions, notamment entre insurrectionnalistes. Depuis 2010, nouveaux développements, autour d'Anarchisr Developments in Cultural Studies notamment. Idée qu'en fait anarchisme et post anarchisme ne sont pas si différents. Colloque the anarchist turn à la New school à New York, pour tournant anarchiste en philo et en sciences sociales. Aujourd'hui le postanarchisme s'intéresse plutôt au réalisme spéculatif. Conclusion : pas sûr que le postanarchisme serve à quelque chose scientifiquement et politiquement.
On passe à Irène Pereira (philosophie, Iresmo, ESPE Créteil), "Sciences sociales et anarchisme : à l’épreuve des pratiques anti-oppression". Lien entre théorie et mouvements sociaux, comment les sciences sociales sont bousculées par des mouvements. Comment les sciences sociales viennent bousculer l'anarchisme ? En particulier l'anti-oppression, courant apparaissant dans années 90 : ensemble de pratiques s'appuyant sur sciences sociales et idées militantes pour rendre le mouvement social plus inclusif. L'arrivée de ces réflexions chez les anarchiste passe d'abord par le féminisme radical, par la mouvance queer radicale, par le mouvement anarchiste people of color et le mouvement décolonial. Articuler anticapitalisme et luttes anti oppression. L'anarchisme pensait souvent qu'il suffisait de rendre l'organisation horizontale pour éliminer les problèmes de pouvoir. Mais des travaux notamment féministes montrent que ça n'est pas vrai, et l'horizontalité est récupérée par le néolibéralisme. D'où intérêt pour antioppression. Ces pratiques sont importées par des militant-e-s qui ont découvert féminisme radical, black feminism, intersectionnalité, notion de privilège social, théorie queer et sociologie du genre, pensée décoloniale (issue de monde latino américain, groupe colonialite et modernité). Malentendus entre ces théories universitaires et les mouvements sociaux, notamment anarchiste. Cf les anti racialistes. Malentendus sur constructivisme social et postmodernisme. Enfin controverses entre anarchistes sur les rapports entre athéisme et islamophobie
Ces pratiques anti oppression remettent en cause les relations de pouvoir interpersonnelles, et viennent objectiver la position sociale des militants (beaucoup d'hommes blancs classe moyenne), difficulté quand on est un mouvement de défense des dominés
Discussion sur la pensée décoloniale, le réalisme spéculatif, les lignes de privilège, le féminisme matérialiste québécois, ce colloque à la New school of social research. On décide de rester pour la 2e session. Les occupant-e-s commencent peut-être à regretter leur invitation 😂
On reprend avec Caroline Fayolle (histoire, Lirdef, Montpellier), "Une lecture anarchiste de la Révolution française. L’apport historiographique de Daniel Guérin". L'urgence politique du présent est au fondement de la lecture de l'histoire de Guérin, figure marxiste-libertaire
Petit point sur la biographie militante de ouf de Guérin. Révolution française au centre de sa réflexion. Publie beaucoup sur le sujet, notamment son chef d'oeuvre Bourgeois et bras nus, récemment réédité par @LibertaliaLivre avec présentation de Claude Guillon @LignesDeForce
Pour Guérin, la Révolution n'est pas un bloc, et il y a un germe socialiste libertaire dans la Révolution. Il propose une lecture de l'histoire s'inscrivant dans la théorie anar (Proudhon, Kropotkine) plutôt que l'école dominante de l'époque, l'école jacobine (Lefebvre, Soboul). Il essaie de dédoubler la Révolution, il y montre une conflictualité structurelle, de classe, avec la bourgeoisie qui s'empare de l'appareil d'Etat, et le proto-prolétariat dans le sans-culottisme (idée très critiquée par Soboul, comme sa vision de Robespierre). Cette opposition de classe est aussi une opposition entre deux conceptions de la démocratie: gouvernement représentatif contre démocratie directe (portée notamment par Commune de Paris). Pour lui, affrontement de 2 avant-gardes (Terreur contre embryon de dictature du prolétariat).
Projet de "déjacobinisation de la Révolution", passe par lecture de Proudhon (Idée générale de la Révolution), pour qui la Révolution aurait dû amener à une République du travail, mais a failli du fait du "préjugé gouvernemental" et méfiance du prolétariat des révolutionnaires
Il lit aussi Kropotkine (La Grande Révolution), qui reprend critique du "préjugé gouvernemental", cette fois-ci des historiens, qui dénaturent la Révolution en mettant au centre parlementaires. Pour lui deux courants dans la Révolution, celui des jacobins et celui des anarchistes
Spécificité de Guérin: se nourrit de penseurs ayant un rapport politique et non savant au passé. Et lui aussi pense avec le présent, veut réactiver un passé vivant (cf travaux sur référence au passé, contre l'usage au passé : le passé toujours inachevé cf Benjamin ou Castoriadis)
On passe à Philippe Corcuff (science politique, Cerlis, IEP de Lyon), "Mettre en tension Gabriel Tarde et Pierre Bourdieu : ressources sociologiques pour une actualisation de la pensée libertaire". Il va faire un papier sur dialogue entre théorie sociologique et philosophie.
Mise en tension de deux auteurs, Gabriel Tarde et Pierre Bourdieu, dans la perspective des antinomies proudhoniennes. Bourdieu ne fait pas référence à Tarde, et les deux ne sont pas anarchistes, même si Bourdieu, dans ses engagements, à pu avoir des éléments libertaires
Dans anarchisme, mise en tension individualités / cadres sociaux. On peut trouver des ressources chez Tarde, rôle de l'imitation, lecture interactionniste des relations sociales. Chez Bourdieu, les habitus et les champs s'inscrivent dans relations, mais structurales.
Comment penser l'émancipation autonome quand on critique le règne de l'opinion (comme Bourdieu le fait, comme Platon, ce qui amène Rancière à les renvoyer deux à deux) ? Il y a des ressources chez Tarde, concept de conversation : la presse anime le programme des conversations.
On passe à la discussion. sur la conception marxiste de l'histoire, les hérésies médiévales, la transduction d'Henri Lefebvre, les Enragés, de la dialectique, de la neutralité axiologique, de Proudhon, des jeux de langage, du programme de Gotha. Allez, pause déj, à plus
On reprend en ateliers séparés, pendant que l'AG se prépare en amphi E.3.04. Une session "Des sciences sociales anarchistes" animée par Isabelle Bruno (Ceraps, Lille), l'autre sur "L’anarchisme, une pensée du social, animée par Edouard Leport (Cresppa-CSU, Paris 8).
On commence la 1ère session avec un intervention de Jean-Charles Buttier @jcbuttier (science de l’éducation, Édhice, Genève), "Pour une histoire politique de l’éducation : l’apport de la pédagogie libertaire à la mise en place de l’école républicaine (1878-1914)"
James Guillaume a enseigné, il s'engage dans la fédération jurasienne, il doit quitter la Suisse, appelé en France par Ferdinand Buisson pour participer au Le Dictionnaire de pédagogie et d'instruction primaire. C'est un anti-autoritaire chez les républicains, important pour sa participation au dictionnaire, bible des instituteurs, et à la Revue pédagogique. Son importance dans l'histoire pédagogique vient de ses Idées sur l'organisation sociale, où il repense le rôle de l'instituteur. Quelle importance pour la didactique ? Intérêt d'historiciser les supports, replacer la didactique dans le contexte des débats politiques et pédagogiques. Guillaume ayant eu un rôle de passeur, par delà frontière pédagogie/politique, il est intéressant pour cette historicisation
On passe à Charles MacDonald (ethnologie, ADES, Aix-Marseille), "Ethnologie et Anarchisme. Les systèmes anarchogrégaires". Il est venu à l'anachisme par l'anthropologie. Quel rapport entre anthropologie et anarchisme ?
Paradoxe : les ethnologues ont observé pendant un siècle et demi des populations anarchiques mais n'ont généralement pas utilisé les idées anarchistes. Pourquoi ? Ethnocentrisme, hégémonie du marxisme, difficulté à penser une société sans chefs (+ dur que sans propriété privée)
Il y a des exceptions : Clastres, Diamond, Morris. Mais généralement pas de réflexion sur les sociétés anarcho-grégaires, ou collectifs d'agrégation faible, définis par 3 traits : pas de chef, identités collectives non linéaires, force de cohésion.
Comment marchent ces collectifs ? Par la coopération volontaire entre individus autonomes, ce qui requiert le mutualisme, une synthèse plus importante que la réciprocité de Lévi-Stauss. Dans ces sociétés, règne des liens faibles, définis non par l'intensité des liens émotionnels, mais par sa faible durée et sa non validation par une autorité tierce. Ces liens étant temporaires, il faut les renforcer et les réparer (fission / fusion des bandes)
Quelles conditions de félicité de la vie collective de ces sociétés ? Dispositifs de signes et symboles mettant en scène la non hostilité. et surtout partage / réciprocité. Cf Mauss sur le don, obligation de donner, recevoir, rendre, moteur de l'organisation sociale.
Très important modèle, mais a rendu invisible celui du partage, ethos fondamental des collectifs anarcho-grégaires. C'est encore le noyau de notre moralité. Bim.
On finit l'atelier avec Philippe Pelletier (géographie, EVS, Lyon 2), "Géographie anarchiste, non — Géographes anarchistes, oui — Du danger du scientisme en politique". Pelletier fait partie du réseau des géographes libertaires. Mais pas d'accord avec l'idée d'une géographie anar. La géographie, à la fois science sociale et science naturelle. Importance historique de l'apparition du darwinisme social, qui nous renseigne sur les risques du scientisme en géographie (cf F Raztel, fondateur de géographie humaine, théoricien du Lebensraum, espace vital). Mais on sait moins qu'un autre aspect de géo a été instrumentalisé par développement urbain : le modèle du nazi Christaller des places centrales. Aux Etats Unis, on trouve des choses fortes chez E C Semple, vision déterministe de la géographie.
Ellworth Huntington fait le lien entre race et climat, théorie racialiste, président de la Société écologique américaine, de societe de géographes, d'eugenistes. N'oublions pas que premier modèles eugénistes sont aux Etats Unis (cf André Pichot sur l'eugénisme)
Les géographes anarchisteq fonctionnent en réseau, avec militants. cf Elisée Reclus, trois règles à la géographie sociale : lutte des classes, recherche de l'équilibre, décision souveraine de l'individu. Mésologie, science des milieux, l'homme est un milieu pour l'homme.
XiXe siècle, batailles académiques après Darwin pour recombinaison des disciplines. Parmi propositions, mésologie (Bertillon) et écologie (Haeckel), interactions des organismes entre eux et avec l'extérieur, angle très biologique (éco systèmes). Cette dernière a du succès.
Haeckel est un anti-socialiste, anti-égalitaire, darwinisme social radical, pas de libre arbitre, membre de Société pour l'Hygiene de la Race, de la Société de Thulé. Vacher le traduit et dans préface demande d'adopter comme devise "Déterminisme, inégalité, sélection"
Victoire de l'écologie, cf déclaration Barrows, la géographie est l'écologie humaine, géographie au service de l'aménagement du territoire. Cf sociologues de l'École de Chicago, spatialisation et modélisation de la ville. Occultation de tout ça dans les histoires de l'écologie
Après 1945, écologie académique gagne son rang d'idée dominante avec le catastrophisme de Vogt et Osborn. En France B de Jouvenel, ancien du PPF de Doriot puis fondateur de la néolibérale société du Mont-Pèlerin, fonde écologie politique, prologue de capitalisme vert planifié
Tournant du Rapport Meadows, à lire, prédictions fausses. Choc. Début du scientisme écologiste. Dangereux de mettre adjectif anarchiste à un science, même écologie ou géographie.
Pendant ce temps, session "L’anarchisme, une pensée du social", animée par Edouard Leport (sociologie, Cresppa-CSU, Paris 8). Avec Paula Cossart (sociologie, Ceries, Lille), "Se référer à l’histoire pour faire du municipalisme libertaire une ‘utopie réelle’ "
Clémence Nasr (théorie politique, Centre de théorie politique, Université libre de Bruxelles), "Du lieu à la pensée du corps social. Réinvestissement sociologique de la commune anarchiste"
Jean Bérard (histoire, ISP, ENS Saclay), « Peut-on briser le bâton de la justice ? L’anarchisme à l’épreuve de la justice pénale ». Je peux pas LT, j'ai hâte de regarder les vidéos et de lire les papiers. Bon bah du coup dernière discussion avant fin du colloque et AG de lutte
Fin du colloque "anarchisme et sciences sociales" et suspension de l'occupation de l'amphi (aucun lien hein). Merci à tou-te-s les participant-e-s, au personnel administratif, au public et aux éditions libertalia, aux Âmes d'Atala, au CCL pour la table de presse / infokiosk !
« Notre monde n’a jamais été aussi peu violent, disent les chiffres et certains essayistes. S’en remettre à des éléments statistiques quantitatifs est insuffisant, rétorque François Cusset. »
« Etre blanc⋅he est donc moins une question d’épiderme que de position sociale et économique dans un contexte socio-historique donné. De la même manière, «racisé» ne désigne pas une identité communautaire, mais une marque associée à une position sociale, économique, politique et symbolique subalterne. »
(via https://www.seven-ash-street.fr/links/?YE3HUg)
(via https://www.seven-ash-street.fr/links/?YE3HUg)
« Féministe, tu as sans doute déjà rencontré, lors d'un débat, cette personne qui te parlait des animaux pour justifier les rôles genrés ?
Qui t'expliquait que "oui mais après tout, c'est bien les babouines et les lionnes qui s'occupent des enfants" ? Colette Guillaumin aussi
Elle a écrit un article sur "l'éthologie", et la mode soudaine des docus animaliers apparue vers les années 60
Elle y inclut toute la vulgarisation scientifique autour des études animalières, revues, articles de presse, etc.
Elle remarque que souvent, ces études parlent en fait moins des animaux que des hommes, et de la sociabilité humaine
"Ancienne tradition assurément que l'appel aux animaux pour figurer les hommes", dit-elle en citant les fables de La Fontaine en exemple
Le présupposé de beaucoup de ces docus, remarque-t-elle, c'est de réduire la socialité humaine à une socialité "animale" homogène
"Ceci au profit d'une homogénéité supposée de la socialité du vivant". Sauf qu'en fait, si souvent on tente d'expliquer l'homme en observant les lions ou les loups, on défend par contre les différences entre les espèces entre elles : on dit "l'H est un loup pour l'H", mais on ne se préoccupe pas d'expliquer le loup par le chimpanzé. Le référent est tjs l'H, pas le comportement socio-animal en tant que tel
Conclusion : "l'animal est le masque qui dissimule le projet de justifier l'homme", et un ordre social
Du coup, quels animaux sont choisis, se demande Guillaumin ? En fait, ça dépend de ce qu'on cherche à prouver au départ
"L'ensemble des sociétés animales [...] vient offrir des miroirs à chacun des aspects de la socialité de l'homme"
"Car en effet, ce ne sont pas ts les aspects d'une société animale donnée qui vont venir, dans leur totalité, expliquer la socialité humaine Ce sont les aspects de la société animale, atomisés, qui sont le plus propres à confirmer l'idée qu'on s'est déjà faite sur les caractères dominants de la socialité humaine".
Du coup, si le but est de garder les femmes à la cuisine, "on ne manquera pas de trouver les babouins ou les vaches qui viendront de leur exclusivisme femello-parental appuyer les vues les plus solides sur la spécialisation naturelle des F" à s'occuper des enfants, les nourrir, etc. "Les espèces animales où [...] le sens paternel assure seul la conservation de l'espèce seront noyées d'une épaisse obscurité".
Conclusion : "Les sociétés animales offrent une si vaste étendue de faits, interprétables dans des directions fondamentalement différentes, qu'on ne pourrait sérieusement défendre l'idée d'un ordre naturel, universel, immuable, propre à la socialité de toutes les formes animales".
J'ajoute un dernier truc qu'elle développe car ce thread comment à être beaucoup trop long lol : elle remarque que les historiens sont svt prudents sur la possibilité de comparer des sociétés humaines, idem les anthropologues ; pourquoi alors on accepte si facilemt de commenter la conduite d'un groupe humaine à la lumière d'un autre groupe animal ? Ce faisant, dit-elle, on refuse de tenir compte de 3 éléments constitutifs de la socialité humaine : la technique, la conscience, et l'histoire.
Voilà j'arrête ici, le titre de l'article :
"Les harengs et les tigres. Remarques sur l'éthologie", publié en 1978 pour la 1ère fois et republié là dedans : https://editions-ixe.fr/content/sexe-race-pratique-du-pouvoir »
Qui t'expliquait que "oui mais après tout, c'est bien les babouines et les lionnes qui s'occupent des enfants" ? Colette Guillaumin aussi
Elle a écrit un article sur "l'éthologie", et la mode soudaine des docus animaliers apparue vers les années 60
Elle y inclut toute la vulgarisation scientifique autour des études animalières, revues, articles de presse, etc.
Elle remarque que souvent, ces études parlent en fait moins des animaux que des hommes, et de la sociabilité humaine
"Ancienne tradition assurément que l'appel aux animaux pour figurer les hommes", dit-elle en citant les fables de La Fontaine en exemple
Le présupposé de beaucoup de ces docus, remarque-t-elle, c'est de réduire la socialité humaine à une socialité "animale" homogène
"Ceci au profit d'une homogénéité supposée de la socialité du vivant". Sauf qu'en fait, si souvent on tente d'expliquer l'homme en observant les lions ou les loups, on défend par contre les différences entre les espèces entre elles : on dit "l'H est un loup pour l'H", mais on ne se préoccupe pas d'expliquer le loup par le chimpanzé. Le référent est tjs l'H, pas le comportement socio-animal en tant que tel
Conclusion : "l'animal est le masque qui dissimule le projet de justifier l'homme", et un ordre social
Du coup, quels animaux sont choisis, se demande Guillaumin ? En fait, ça dépend de ce qu'on cherche à prouver au départ
"L'ensemble des sociétés animales [...] vient offrir des miroirs à chacun des aspects de la socialité de l'homme"
"Car en effet, ce ne sont pas ts les aspects d'une société animale donnée qui vont venir, dans leur totalité, expliquer la socialité humaine Ce sont les aspects de la société animale, atomisés, qui sont le plus propres à confirmer l'idée qu'on s'est déjà faite sur les caractères dominants de la socialité humaine".
Du coup, si le but est de garder les femmes à la cuisine, "on ne manquera pas de trouver les babouins ou les vaches qui viendront de leur exclusivisme femello-parental appuyer les vues les plus solides sur la spécialisation naturelle des F" à s'occuper des enfants, les nourrir, etc. "Les espèces animales où [...] le sens paternel assure seul la conservation de l'espèce seront noyées d'une épaisse obscurité".
Conclusion : "Les sociétés animales offrent une si vaste étendue de faits, interprétables dans des directions fondamentalement différentes, qu'on ne pourrait sérieusement défendre l'idée d'un ordre naturel, universel, immuable, propre à la socialité de toutes les formes animales".
J'ajoute un dernier truc qu'elle développe car ce thread comment à être beaucoup trop long lol : elle remarque que les historiens sont svt prudents sur la possibilité de comparer des sociétés humaines, idem les anthropologues ; pourquoi alors on accepte si facilemt de commenter la conduite d'un groupe humaine à la lumière d'un autre groupe animal ? Ce faisant, dit-elle, on refuse de tenir compte de 3 éléments constitutifs de la socialité humaine : la technique, la conscience, et l'histoire.
Voilà j'arrête ici, le titre de l'article :
"Les harengs et les tigres. Remarques sur l'éthologie", publié en 1978 pour la 1ère fois et republié là dedans : https://editions-ixe.fr/content/sexe-race-pratique-du-pouvoir »
Pas encore pris le temps d'écouter.
43min #Usul
« J'ai envie de vous faire une tweet story sur une pandémie dans un jeu vidéo, qui a abouti à une publication dans le Lancet Infection Disease
Vous connaissez surement déjà cette anecdote, mais au cas où.
Voici l'histoire de l'incident du Sang Vicié.
L'histoire prend lieu dans le monde de World of Warcraft en sept 2005. A cette époque on dénombre plus de 4 millions de joueurs
Pour bien comprendre cette histoire, je vous résume rapidement certains principes du monde de World of Warcraft.
Il s'agit d'un monde, vaste, avec plusieurs capitales, un système de transport par téléportation, ou avec des montures.
Pour les joueurs de haut level, il existe ce que l'on appelle des instances, des raids. Des gros défis.
Ce sont des missions qui se jouent à plusieurs, et qui se terminent par un boss final particulièrement difficile à battre.
En sept 2005, arriva l'instance de Zul'Gurub, défi pour les joueurs haut level, en équipe de 20 personnes.
A la fin de cette instance, un boss, assez coriace prénommé Hakkar l'Écorcheur d'Âmes qui avait un sort particulier.
Je vous présente Hakkar. Charmant, n'est-ce pas ?
http://files.nekoblog.org/uploads/imgs/tweet-rifampicine-hakkar.jpg
Son sort agissait comme un poison, un malus qui retirait une centaine de point de vie par seconde à la personne atteinte.
Ce sort avait pour particularité de se transmettre aux joueurs proches de la personne atteinte, ainsi qu'aux "pets".
Les pets, sont des animaux de compagnie, avec des capacités spéciales, pouvant être invoqués par certaines classes.
Ils peuvent être invoqués ou renvoyés selon les cas de figure et les besoins de l'invocateur. Je simplifie c'est pas le sujet.
Lors d'un combat, l'un des animaux fut contaminé, en étant à proximité de son invocateur lui même atteint par le malus du boss.
L'invocateur, réalisa, ou pas, que son animal était infecté. Le fait est qu'il le renvoya, avant qu'il ne soit guéri ou mort.
Je dis "guéri ou mort", car les deux seuls moyens de se débarrasser de ce malus étaient d'être soigné ou d'en mourir.
L'autre possibilité était tout simplement de sortir du raid. Malheureusement, cela n'avait pas été pensé pour les animaux.
Oui, du coup il y avait 3 moyens. Ok j'avoue, j'ai mal compté. Pardon.
Toujours est il que cet oubli fut le point de départ de ce que l'on appelle ajd, l'Incident du Sang Vicié, du nom du sort.
L'invocateur, une fois l'instance terminée, retourna en ville, et réinvoqua son animal, malade.
Les villes de World of Warcraft sont très très peuplées, avec des voyageurs venus des quatre coins du monde
Sur place pour plus ou moins longtemps, de tout niveau, joueurs confirmés, joueurs novices, haut et bas level.
Tout comme une ville réelle, avec des gens à la santé fragile, d'autres plus résistants, des locaux, des voyageurs etc.
L'animal commença à contaminer, par proximité, 1 personne puis 2, puis d'autres qui contaminèrent à leur tour d'autres joueurs.
Pour les joueurs de haut niveau, la perte de vie, insignifiante, retardait la réalisation de la maladie et donc son soin.
Tout comme une personne en bonne santé développera les symptomes d'autant plus tardivement, favorisant ainsi la transmission.
Les joueurs se téléportèrent d'une ville à l'autre, sans réaliser leur malus, et la maladie se répandit partout dans le monde.
Armée des douze singes spotted.
Cela fut terrible pour les joueurs novices, avec peu de points de vie, qui mourraient en boucle, réinfectés après résurrection.
Ils furent les victimes les plus nombreuses, comme toute personnes avec un terrain fragile (agées, nourissons...).
Autre point qui joua sur le déroulement des événements. Les PNJ, personnages non joueurs, furent aussi infectés.
Les PNJ sont indispensables au bon déroulement du jeu en intervenant dans l'épopée de chaque joueur.
Pour éviter tout problème lié à la disparition d'un PNJ, leurs points de vie sont très élevés et ils ne peuvent pas mourir.
Etant des personnages non joueurs, ils ne se soignaient pas, et restaient porteurs/transmetteurs sains de la maladie.
Je résume le tout avec un schéma issu d'une publication sur le sujet dont le lien arrive bientôt.
http://files.nekoblog.org/uploads/imgs/tweet-rifampicine-schema.jpg
Devant cette pandémie, les employés de Blizzard (concepteur du jeu), demandèrent aux personnes infectées de rester entre elles.
Pour créer des zones de quarantaine, le temps que le phénomène puisse être éradiqué. Ahah les utopistes...
Bien sur il suffira de quelques joueurs, ne souhaitant pas respecter ces directives pour anéantir totalement cette stratégie.
Finalement, Blizzard, provoqua un reset et appliqua une MàJ où ce malus n'existait pas, pour venir à bout de la pandémie.
Devant cet épisode, des chercheurs décidèrent a posteriori d'étudier le comportement des joueurs et de la maladie dans le jeu.
En utilisant les données récoltées par les serveurs du jeu au moment de l'incident.
Ils voulaient utiliser ces données pour faire des projections en cas de pandémie dans le monde réel, cette fois.
Cela fut d'autant plus utile que les réactions des joueurs furent aussi diverses qu'elles pourraient l'être dans le monde réel.
Entre ceux qui se hâtaient à travers le monde de soigner tout joueur atteint, ceux qui s'amusaient à répandre la maladie,
Ceux, infectés, qui évitaient d'eux mêmes tout contact pour éviter de transmettre la maladie. #shootmeimalreadydead
Ceux, non infectés, qui, poussés par la curiosité allaient voir ce qui se passait et revenaient ensuite dans leur capitale.
Ceux qui fuirent les villes pour rester le plus loin possible des zones atteintes, entre non infectés.
Bref, autant de réaction qui permirent à des chercheurs d'aboutir à des modèles de projection, dont une publication.
Qui ouvrit la porte de l'utilisation des MMORPG pour étudier les réactions d'une communauté face à un problème.
Publication que vous pourrez trouver dans le lien ci dessous.
http://rifters.com/real/articles/Lofgren_Fefferman_Lancet.pdf
( sauvegarde : http://files.nekoblog.org/uploads/pdf/Lofgren_Fefferman_Lancet.pdf )
Merci d'avoir lu jusque là :) »
Vous connaissez surement déjà cette anecdote, mais au cas où.
Voici l'histoire de l'incident du Sang Vicié.
L'histoire prend lieu dans le monde de World of Warcraft en sept 2005. A cette époque on dénombre plus de 4 millions de joueurs
Pour bien comprendre cette histoire, je vous résume rapidement certains principes du monde de World of Warcraft.
Il s'agit d'un monde, vaste, avec plusieurs capitales, un système de transport par téléportation, ou avec des montures.
Pour les joueurs de haut level, il existe ce que l'on appelle des instances, des raids. Des gros défis.
Ce sont des missions qui se jouent à plusieurs, et qui se terminent par un boss final particulièrement difficile à battre.
En sept 2005, arriva l'instance de Zul'Gurub, défi pour les joueurs haut level, en équipe de 20 personnes.
A la fin de cette instance, un boss, assez coriace prénommé Hakkar l'Écorcheur d'Âmes qui avait un sort particulier.
Je vous présente Hakkar. Charmant, n'est-ce pas ?
http://files.nekoblog.org/uploads/imgs/tweet-rifampicine-hakkar.jpg
Son sort agissait comme un poison, un malus qui retirait une centaine de point de vie par seconde à la personne atteinte.
Ce sort avait pour particularité de se transmettre aux joueurs proches de la personne atteinte, ainsi qu'aux "pets".
Les pets, sont des animaux de compagnie, avec des capacités spéciales, pouvant être invoqués par certaines classes.
Ils peuvent être invoqués ou renvoyés selon les cas de figure et les besoins de l'invocateur. Je simplifie c'est pas le sujet.
Lors d'un combat, l'un des animaux fut contaminé, en étant à proximité de son invocateur lui même atteint par le malus du boss.
L'invocateur, réalisa, ou pas, que son animal était infecté. Le fait est qu'il le renvoya, avant qu'il ne soit guéri ou mort.
Je dis "guéri ou mort", car les deux seuls moyens de se débarrasser de ce malus étaient d'être soigné ou d'en mourir.
L'autre possibilité était tout simplement de sortir du raid. Malheureusement, cela n'avait pas été pensé pour les animaux.
Oui, du coup il y avait 3 moyens. Ok j'avoue, j'ai mal compté. Pardon.
Toujours est il que cet oubli fut le point de départ de ce que l'on appelle ajd, l'Incident du Sang Vicié, du nom du sort.
L'invocateur, une fois l'instance terminée, retourna en ville, et réinvoqua son animal, malade.
Les villes de World of Warcraft sont très très peuplées, avec des voyageurs venus des quatre coins du monde
Sur place pour plus ou moins longtemps, de tout niveau, joueurs confirmés, joueurs novices, haut et bas level.
Tout comme une ville réelle, avec des gens à la santé fragile, d'autres plus résistants, des locaux, des voyageurs etc.
L'animal commença à contaminer, par proximité, 1 personne puis 2, puis d'autres qui contaminèrent à leur tour d'autres joueurs.
Pour les joueurs de haut niveau, la perte de vie, insignifiante, retardait la réalisation de la maladie et donc son soin.
Tout comme une personne en bonne santé développera les symptomes d'autant plus tardivement, favorisant ainsi la transmission.
Les joueurs se téléportèrent d'une ville à l'autre, sans réaliser leur malus, et la maladie se répandit partout dans le monde.
Armée des douze singes spotted.
Cela fut terrible pour les joueurs novices, avec peu de points de vie, qui mourraient en boucle, réinfectés après résurrection.
Ils furent les victimes les plus nombreuses, comme toute personnes avec un terrain fragile (agées, nourissons...).
Autre point qui joua sur le déroulement des événements. Les PNJ, personnages non joueurs, furent aussi infectés.
Les PNJ sont indispensables au bon déroulement du jeu en intervenant dans l'épopée de chaque joueur.
Pour éviter tout problème lié à la disparition d'un PNJ, leurs points de vie sont très élevés et ils ne peuvent pas mourir.
Etant des personnages non joueurs, ils ne se soignaient pas, et restaient porteurs/transmetteurs sains de la maladie.
Je résume le tout avec un schéma issu d'une publication sur le sujet dont le lien arrive bientôt.
http://files.nekoblog.org/uploads/imgs/tweet-rifampicine-schema.jpg
Devant cette pandémie, les employés de Blizzard (concepteur du jeu), demandèrent aux personnes infectées de rester entre elles.
Pour créer des zones de quarantaine, le temps que le phénomène puisse être éradiqué. Ahah les utopistes...
Bien sur il suffira de quelques joueurs, ne souhaitant pas respecter ces directives pour anéantir totalement cette stratégie.
Finalement, Blizzard, provoqua un reset et appliqua une MàJ où ce malus n'existait pas, pour venir à bout de la pandémie.
Devant cet épisode, des chercheurs décidèrent a posteriori d'étudier le comportement des joueurs et de la maladie dans le jeu.
En utilisant les données récoltées par les serveurs du jeu au moment de l'incident.
Ils voulaient utiliser ces données pour faire des projections en cas de pandémie dans le monde réel, cette fois.
Cela fut d'autant plus utile que les réactions des joueurs furent aussi diverses qu'elles pourraient l'être dans le monde réel.
Entre ceux qui se hâtaient à travers le monde de soigner tout joueur atteint, ceux qui s'amusaient à répandre la maladie,
Ceux, infectés, qui évitaient d'eux mêmes tout contact pour éviter de transmettre la maladie. #shootmeimalreadydead
Ceux, non infectés, qui, poussés par la curiosité allaient voir ce qui se passait et revenaient ensuite dans leur capitale.
Ceux qui fuirent les villes pour rester le plus loin possible des zones atteintes, entre non infectés.
Bref, autant de réaction qui permirent à des chercheurs d'aboutir à des modèles de projection, dont une publication.
Qui ouvrit la porte de l'utilisation des MMORPG pour étudier les réactions d'une communauté face à un problème.
Publication que vous pourrez trouver dans le lien ci dessous.
http://rifters.com/real/articles/Lofgren_Fefferman_Lancet.pdf
( sauvegarde : http://files.nekoblog.org/uploads/pdf/Lofgren_Fefferman_Lancet.pdf )
Merci d'avoir lu jusque là :) »